Le moqueur

à Tristan Questier

Acclamez, bonnes gens, le blagueur de l’extrême !
Approchez, hâtez-vous : il réclame un poème,
J’ai tant à vous dire de cette âme bohème…

Il est aventurier, et il grimpe sans peur :
Du Vercors au Mont Blanc, il vole quelques heures
Pour gravir les sommets, rejoindre les hauteurs.

Pris de vertiges quand la terre s’aplanit,
Il ne descend que pour visiter ses amis
Et tirer après lui braves et moins hardis.

Regardez, il sourit : c’est qu’il a deviné
Que même un poème ne saurait l’épargner,
Et cacher ses travers à cause d’amitié.

Il a les yeux plissés par un air de malice,
Sans doute a-t-il en tête un tout nouveau supplice :
Le voilà qui tente de trouver des complices.

Amis, courez, fuyez ! et gardez vos distances !
Ce sourire enjôleur et chargé d’insolence
Vous ferait, sans grand mal, croire à sa bienveillance…

Méfiez-vous toutefois des vaines illusions ;
Il est expert en l’art de manipulation,
De vous, quoi qu’il advienne, il sait avoir raison.

De chantage en pari, de fables en sourires,
Il promet les montagnes ? Attendez-vous au pire !
Il ne vous reste plus que l’arme du soupir…

Peste ! Vous regrettez le jour de votre oui !
C’est alors que surgit, du profond de la nuit,
Une pointe d’humour, un trait d’esprit gratuit.

La rancœur s’estompe ; malgré la résistance
Qu’on aimerait offrir, le rire entre en cadence,
La raillerie répond, avec insouciance.

C’est là un grand talent que celui du moqueur :
Il chasse la peine et, du fond de votre cœur,
Soutire à votre insu le profil d’un blagueur.

Le reconnaissez-vous, ce vieil ami, Tristan ?
Un poème est trop court, il faudrait un roman
Mais je me garderai ce défi pour l’instant.

Il sera temps, plus tard, d’échanger cette idée
Contre un cornet de frites, une course nus pieds,
Ou pour le jour de l’an, il fallait y penser !

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